©Kiriko Nananan

samedi 12 décembre 2009

Fantômes



I

C’est dans la nuit
que je reviens vers toi
A l’heure froide
où la ville est silencieuse
Souvenir envahissant
qui prend toute la place
comme tu le faisais autrefois
avec ton corps d’abricot
et tes lents yeux de mer

Avec toi dans la foudre
ensemble dans l’éclair
qui a pulvérisé mon monde
et fait naître toutes les couleurs
Les petites pierres grises de la rivière
ont pris ce jour-là les couleurs
du tremblement de terre
Et moi tout en haut de ton échelle de Richter
j’ai cueilli un baiser duveteux

Tu es devenu grizzli
et m’as portée sur ton dos

Tu m’as bercée
au cœur des forêts immenses
des étincelles au bout de tes doigts
quand tu me faisais fougère
me faisais foudre
me faisais fée



II

Nous étions dans un ventre
nous étions dans un ventre et tu étais mon frère
mon frère de par-delà les montagnes
mon frère de terre et d’eau

Je t’ai revu cette nuit
dans un désert de vent sec
et de stériles entrepôts
Ton étreinte était la même
ta chaleur d’homme était la même
ma raison ne pouvait rien y faire
dans un désert de vent sec et de fer
toi qui étais
il y a longtemps pas si longtemps
mon frère



III

Je tiens le fantôme de notre amour
dans la paume de ma main
Il a des yeux en boutons de bottine
et de petites griffes
qu’il me plante dans la chair
Je saigne un peu

T’écrire sur la nuit !
Depuis tout ce temps
je suis en exil de moi-même
je ne suis plus là
mais ton fantôme a pris ses aises
et ton manque
à hurler
dans chaque recoin de moi

Je tourne à vide
je tourne avide
ma peau est ta peau est ma peau est ta peau
j'ai fait le tour de toi
et je ne m'en rassasie pas

Oh te revoir une dernière fois !
encore une fois te serrer
t’aimer encore une fois

Tu marches à côté de moi
tu marches en moi
dans cette place vide
qui n’appartient
qu’à toi

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