©Kiriko Nananan

samedi 27 février 2010

Arbres - G



à Julia

Le noir de ses cheveux
le noir de tes cheveux
le noir de mes cheveux

Femmes de mon clan
aux mouvances des terres incultes
vous avez retroussé vos rêves
et avez avancé

Femmes de mon sang
dehors, nos mésanges
et la beauté
de ce qui ne sera pas toujours là

Dans la pénombre de la cuisine
silence chaud des tommettes
et l’odeur des objets immobiles
Un rai de lumière
sur la pierre
d’évier

Des pots de confiture
groseilles et graminées
La rumeur bleue des abeilles
feu vivant du ciel
Jour de cueillette dans le cerisier

Pour vous j’aimerais être un arbre
Pour vous j’aimerais devenir
chaude plage de miel
caressée par les vents insatiables
pain de nos mains pourpres
ou velours de louve tendu
entre moi et presque moi





Photo du haut tirée du film "Bright Star" de Jane Campion
Photo du bas tirée du film "Le village de mes rêves" de Yoichi Higashi

mardi 23 février 2010

mutations

route de temps
Lizard king m’a sauvée
du gluant
du rampant
vie blette étouffée
et vérité tue
et le démon assis sur mon épaule
rit gentiment des failles
la tête dans les baffles
pulse flux vital
fil ténu tendu
vertu des esquisses-souillons
sphère tue des âges en mutation
qui m’amèneront où je suis

samedi 20 février 2010

endymion penché




pieds de granit
et chant d’oiseau
pulpe charnu fruit rond
orbe pure incorruptible
chat-caresse
ronde joue
pâle joue
jeune regard vert
très grand
trop brillant
trille terreur liquide nue
dague à mon cœur en sauvagerie

il est abeille sur cette fleur bleu-violet
poussière dans la liquide lumière
nuée écume lichen et lierre
mousse de son nom écrit sur l’eau
et des crevasses dans le marbre du tombeau


à J.K. ... évidemment




Inspiré par le Keats de Jane Campion et Ben Whishaw.
Curieuse coïncidence (ou pas ?), la jacinthe des bois que j'aime tant - et que Jane Campion semble aimer aussi - est parfois appelée "Endymion penché". Keats aurait-il apprécié le clin d'oeil à son oeuvre ?




Toutes les photos sont tirées du film

vendredi 19 février 2010

Diarc'hen, etrezek ar Beacons



A l’heure des loups
avance sauvage vers mon fanal
le chevalier de pentacles
enténébré

un den gouez
o vale diarc’hen

Maître des wastelands et de la mandragore
le front ceint de nuit
de bourgeons d’ellébore
wolfsbane épée nue
bouclier des âmes grises
lent gardien des étoiles immobiles

Par-delà ses montagnes
ternes plaines sans sources
et forêts mortes d’ennui
une trop bruyante absence d’oiseaux

klemmgan
ar c’halonoù glan

Sentinelle sur une hauteur
j’allume des brasiers
contre le petit soir malade

J’ai été avec toi dans la foudre
et le froissement de tes cils
guerrier maître du rêve éveillé
présente absence des nuits hérissées

***

Ur varzhoneg awenet gant ar gartenn-mañ, met ivez gant Amon Dîn ijinet gant Tolkien, skrivet evit hag awenet gant ur paotr daoulagad targazh dezhañ ho peus bet tro da glevet komz deuzoutañ war ar blog-mañ...

The passing of the Elves



A travers les siècles les forêts de cristal
dans une poussière de rayons
ils apparaissent

Couronnés de vent marin et de brume d’étoiles
de pollen mélodie et fougères frissonnantes
une musique éternelle sous leurs pas
ils foulent souples les sources mystérieuses
tapis d’aiguilles des vieilles forêts du monde

Un rai de lumière sur les troncs
et ils sont là
où n’était qu'illusion d’ombres blondes
échos argentins des étoiles
veillant sur les âges du monde

***

Inspiré par cette photographie de Mikaël Helleux sur le mur de mon salon (dont vous voyez ici une mauvaise reproduction, l'original est bien plus beau) - malheureusement, je n'ai jamais su son titre...
Son site : http://etc.photo.free.fr/

jeudi 18 février 2010

de reiziger




des heures et des jours au canal pourrissant il pleuvine des immondices charriés ciel lourd cœur qui coule sur les vitres d’un tram cœur foulé dans les flaques arraché déflagration flagrante à mon âme liquide catafalque lierre des murs lierre des siècles des écluses alanguies déluge d’un monde renversé en vrac odeur d’aube sur l’herbe du béguinage





A la plus fascinante et mystérieuse des villes...

Remonter le canal vers le donjon
Me dorer à l’ombre des vieilles pierres
Laissez-moi revenir





...J'emprunte ce titre à Laïs (album "A la capella")...

J.R.R. Tolkien - "The leaves were long...", poème pour Luthien Tinúviel


Illustration : Anke-Katrin Eiszmann


The leaves were long, the grass was green,
The hemlock-umbels tall and fair,
And in the glade a light was seen
Of stars in shadow shimmering.
Tinúviel was dancing there
To music of a pipe unseen,
And light of stars was in her hair,
And in her raiment glimmering.

There Beren came from mountains cold,
And lost he wandered under leaves,
And where the Elven-river rolled
He walked alone and sorrowing.
He peered between the hemlock-leaves
And saw in wonder flowers of gold
Upon her mantle and her sleeves,
And her hair like shadow following.

Enchantment healed his weary feet
That over hills were doomed to roam;
And forth he hastened, strong and fleet,
And grasped at moonbeams glistening.
Through woven woods in Elvenhome
She lightly fled on dancing feet,
And left him lonely still to roam
In the silent forest listening.

He heard there oft the flying sound
Of feet as light as linden-leaves,
Or music welling underground,
In hidden hollows quavering.
Now withered lay the hemlock-sheaves,
And one by one with sighing sound
Whispering fell the beechen leaves
In the wintry woodland wavering.

He sought her ever, wandering far
Where leaves of years were thickly strewn,
By light of moon and ray of star
In frosty heavens shivering.
Her mantle glinted in the moon,
As on a hill-top high and far
She danced, and at her feet was strewn
A mist of silver quivering.

When winter passed, she came again,
And her song released the sudden spring,
Like rising lark, and falling rain,
And melting water bubbling.
He saw the elven-flowers spring
About her feet, and healed again
He longed by her to dance and sing
Upon the grass untroubling.

Again she fled, but swift he came,
Tinúviel! Tinúviel!
He called her by her Elvish name;
And there she halted listening.
One moment stood she, and a spell
His voice laid on her: Beren came,
And doom fell on Tinúviel
That in his arms lay glistening.

As Beren looked into her eyes
Within the shadows of her hair,
The trembling starlight of the skies
He saw there mirrored shimmering.
Tinúviel the elven-fair,
Immortal maiden elven-wise,
About him cast her shadowy hair
And arms like silver glimmering.

Long was the way that fate them bore,
O'er stony mountains cold and grey,
Through halls of iron and darkling door,
And woods of nightshade morrowless.
The Sundering Seas between them lay,
And yet at last they met once more,
And long ago they passed away
In the forest singing sorrowless.



Illustration : Alan Lee